Le développement durable, la laïcité, l’évolution de la démographie, la santé, la lutte contre toutes les discriminations, la marchandisation de l’éducation et des loisirs … Le contexte sociétal est plus complexe aujourd’hui, et notre rapport au politique devient plus périlleux. Pour autant ils sous-tendent des enjeux éducatifs, d’aujourd’hui pour les Ceméa de demain : dans l’éducation formelle, non formelle, l’éducation relative à l’environnement, à l’alimentation, l’éducation aux médias… Quelles priorités ? Quelles orientations ?
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POUR LA LAÎCITE !
Bonjour cher-e-s militant-e-s des CEMEA,
Animatrice socioculturelle depuis 1989, j’ai rencontré l’équipe de l’AT région Centre en 2005.
Depuis lors je suis militante des CEMEA.
Dans cette région, ce que j’expose ci-dessous est un sujet qui ne s’est jamais présenté à moi. La pratique de la laïcité était pour moi, à cette époque et dans ce contexte, claire et sans équivoque : accueil de tous !
Arrivant par le biais de l’animation volontaire à l’ARIF, en avril 2014, je pars alors à Fort Mahon, 15 jours, enchainer deux stages BAFA.
J’accepte alors de me soumettre à la position de la directrice de stage, qui est de « dévoiler » une stagiaire musulmane avant d’entrer en stage. Mais j’exprime mon désaccord. La directrice me renvoie alors que « j’ai le cul entre deux chaises », ce que je ne peux nier, puisque malgré mon désaccord j’accepte de dévoiler une stagiaire.
Mais l’acte fut pour moi très violent à réaliser et je ne sais si je peux imaginer la violence perçue par la jeune fille à qui j’ai demandé de dévoiler ses cheveux ; en tout cas, il reste ancré dans ma mémoire, comme étant la première et dernière fois où j’accepterai de m’y soumettre. Plus que honte face à moi-même, je me suis rendue complice d’un acte d’exclusion de l’autre et du refus d’une différence qui n’a pourtant aucune conséquence sur le vivre ensemble en stage.
Parce que j’ai ressenti la violence de mon acte à soumettre une jeune fille à la vision de la directrice de stage, parce que je m’y suis moi-même soumise, le processus de déconstruction eut pour effet une transformation me radicalisant dans la recherche d’une reconstruction plus engagée, plus égalitaire et plus juste du traitement des stagiaires, à faire respecter.
Ce que j’ai alors compris c’est que la/le stagiaire se soumet à la volonté d’un-e directeur-trice de stage, à enlever son voile, pour avoir un papier de reconnaissance de compétences : l’attestation de fin de stage lui permettant ensuite de trouver du travail.
Ce que j’ai alors compris, c’est que certains imposent là « leur vision » de la « soumission supposée de la femme voilée », et les mêmes se permettant par cet acte de soumettre cette dernière à « leur vision de la liberté prétendue de la femme les cheveux au vent».
Je suis en situation de possible puissance, quand je suis formatrice, En situation d’animatrice : je permets le choix à celles/ceux que j’accompagne, leur permet de réfléchir (ce que défendent, me semble-t-il, les CEMEA dans leurs pédagogies) ou au contraire, je les enferme dans « Ma Vérité , Ma recette, Mon dogme » comme leçon à connaitre et à suivre, comme conception du système de pensée et de fonctionnement du monde.
C’est alors rien de moins que faire acte d’oppression envers l’autre, à mon tour.
Le 31 janvier 2015, a lieu une rencontre régionale militante en Ile de France en amont du congrès
Je suis alors, en atelier, dans un groupe de débat, en présence des militant-e-e ARIF et du national, pour certains, membres des CA régional et national. Est portée, à mon sens, une rhétorique consistant à enchainer les anecdotes dressant un tableau stigmatisant :
D’abord envers les jeunes : – « qui ne s’intéressent plus et ne s’engagent plus », ensuite et surtout envers les stagiaires de confession musulmane, qui considèrent – « l’athéisme comme une religion » – « qui veulent manger halal et imposer la prière pendant le stage », et Tariq Ramadan diabolisé comme « stratège et dangereux »….
Choquée d’entendre ces propos tenus par l’un des membres reconnus des CEMEA, je ne suis pas la seule dans l’assemblée à tenter de comprendre, modérer et finalement me positionner contre de tels propos qui tendent à stigmatiser les stagiaires musulmanes et musulmans.
Revenue en plénière, j’interroge l’assemblée sur la problématique posée en atelier. De nos échanges, il en ressort très clairement que les pratiques musulmanes, trop voyantes, selon certains, posent le problème….Et l’un des militants de venir ensuite me voir en aparté, pour me lancer – «certains sont morts pour la laïcité »…
Dès lors, je comprends qu’il y a confusion (consciente ou non) entre laïcité et athéisme et que les actes et paroles islamophobes (conscients ou non) se développent insidieusement.
En Avril 2015, Lors d’un BAFA où je suis formatrice à Aubervilliers, un formateur dévoile 3 stagiaires à l’entrée du stage.
En juin 2015, j’apprends qu’une AT refuse les stagiaires faisant le ramadan
En juillet 2015, j’apprends que le directeur du BAFA de Poissy, avec qui je dois encadrer un stage dévoile les stagiaires musulmanes, une proposition de changer de stage m’est faite à au regard de nos positions différentes.
lors du WE de Regroupement des CEMEA IDF, en juin 2015, un temps sur la laïcité est annulé, en raison de la défection de l’intervenant.
Le 9 Juin 2015 je participe à la journée nationale Ceméa sur la laïcité : il s’agit d’un travail de discussions et d’échanges en petits groupes à partir de situations vécus. Et je m’interroge – « Qu’en faisons-nous ? »
Cette accumulation de faits et de découvertes de positionnements, qui semblent minoritaires, mais que je vis depuis un an, au sein des CEMEA ARIF, les propos stigmatisants, les postures de discrimination à peine voilées, la fuite d’espaces de dialogue à ce sujet, à l’AT IDF, l’affirmation d’une vision athéiste portée dans la charte nationale, m’amène à me demander si je suis en désaccord avec les valeurs et pratiques des CEMEA ou bien si les pratiques que je vis sont en incohérence avec les textes fondateurs.
Je relis le projet éducatif des CEMEA, notamment, le passage que tout stagiaire BAFA lit en préambule de son inscription à un stage :
« La laïcité, c’est l’ouverture à la compréhension de l’autre dans la connaissance des différences et dans le respect du pluralisme. C’est donc le combat pour la liberté d’expression de chacun et contre toute forme d’obscurantisme, d’aliénation, de discrimination, d’exclusion et d’injustice. »
Mais je découvre également que la charte nationale des CEMEA « prône » une autre vision de la laïcité:
«Les CEMEA prône la reconnaissance de l’athéisme comme système de pensée et de compréhension du monde ».
Je m’interroge et partage avec vous : l’athéisme est-il prôné comme étant LA vérité, au sein de nos formations, de notre mouvement dans lequel je m’engage et j’agis ?
Dois-je comprendre au travers de mes situations vécues, que le sens que requiert l’athéisme ici permet d’exclure des personnes aux idées, croyances et pratiques différentes ?
Dois-je comprendre, par mes expériences, que l’exclusion est possible et permise parce que différence il y a, remettant ainsi en cause un de nos fondements : celui d’accueillir tous sans distinction ?
Je ne suis pas venue militer au CEMEA pour « prôner l’athéisme »! Ni quelconque autre système de pensée et de compréhension du monde, Je refuse d’être oppresseur.
Mais je suis militante des CEMEA pour permettre
« L’ouverture à la compréhension de l’autre dans la connaissance des différences et dans le respect du pluralisme. C’est donc le combat pour la liberté d’expression de chacun et contre toute forme d’obscurantisme, d’aliénation, de discrimination, d’exclusion et d’injustice. »
Faire réfléchir, plutôt que de convaincre,
Permettre à celui qui vient vers nous de se « former » et non se faire former,
Rencontrer l’autre dans l’acceptation de sa globalité et de ses différences,
Créer la Rencontre et Réciprocité dans la réalité qui est la notre aujourd’hui !
Doit-on être athée pour militer au CEMEA ?
Prôner l’athéisme, n’est-ce pas la volonté de se communautariser et donc de pratiquer l’entre soi?
Prôner l’athéisme et défendre la laïcité, cette incohérence, qui est notre aujourd’hui, à mon sens, n’est-ce pas ce qui permet des pratiques de discriminations ?
En tant que femme libre et revendiquant la possibilité pour chaque femme de faire ses choix en sa conscience,
En tant que militante des CEMEA, association d’éducation populaire, où je milite parce que je partage la formation pour tous et par tous, tout au long de la vie, la réussite éducative et l’accompagnement culturel, par des méthodes actives et recherche-Action, et parce que association laïque,
En tant que citoyenne du monde, cherchant la rencontre et non l’exclusion,
Je propose que nous réfléchissions ensemble à ce que la phrase prônant l’athéisme soit retirée de la charte nationale. Levant ainsi toute confusion et que partout au CEMEA se pratique effectivement l’accueil de tous ! Athées et toutes autres croyances, origines, cultures, sans que cela ne restreigne en quoi que ce soit la vie collective, mais au contraire l’enrichisse de la découverte et de l’échange.
Je propose qu’ensemble à l’occasion du congrès les valeurs de laïcité, telles que déjà définies dans notre projet des CEMEA soient réaffirmées et qu’ensemble nous recherchions à mettre nos pratiques en concordance :
Ouvrir nos espaces à TOUS-TOUTES sans distinction, comme préalable adhéré à toute action et toute pratique d’exclusion condamnée.
Je serai au CONGRES des CEMEA cet été, mon deuxième congrès.
Je pourrais être fière qu’Edwy Plenel ait accepté d’en faire le discours d’entrée ?
Je pourrais l’être, oui, car cet homme a su porter la voix d’opprimés en certains temps et lors d’une magnifique conférence ouverte à l’IMA à l’automne 2014, après parution de son livre, «Pour les musulmans » …
Et j’espère pouvoir l’être, mais je me questionne. Quel est véritablement le sens de sa venue? Est-ce une vitrine que nous affichons, au CEMEA ou serait-ce une remise en question de nos pratiques, pour les musulmans ? Cela peut être un acte fort, si et seulement si nous actons en notre sein des transformations envers certaines de nos pratiques de discrimination, de teinte islamophobe, lorsque les partenariats se font, acceptant parfois dans les plus beaux salons ou petites associations, de nous rendre complices de maltraitance et d’oppression ?
Qui sommes-nous, formateurs, éducateurs, enseignants, socio-culturels, psy, et autres, pour vouloir imposer notre vision du monde à ceux qui viennent vers nous ?
Je suis passeur, et j’entends ici faiseur de passerelle et non de mur !
Défricheur d’avenir ! « Nous ne sommes pas d’où nous venons, mais ce que nous devenons». Elias Sanbar.
Je suis une graine de CEMEA. Dans un contexte de crise humaine et mondiale, mais aussi de crise de respect et de reconnaissance de l’autre, dans sa proximité, je recherche par le biais de cette lettre, à nous mettre en mouvement sur un chemin de rencontre, au-delà des différences, qui en rien ne nous empêchent de créer et vivre ensemble. La reconnaissance de la différence est l’acceptation de l’être dans sa globalité. Agir pour lui permettre d’être tel que lui-même reconnu par les autres, cela se nomme aussi la solidarité.
Chers militants, c’est votre soutien et créativité, vos retours oraux, écrits, dessinés ?… que je sollicite par cette lettre, pour faire mouvement commun, résister, ouvrir des espaces de dialogue, pour que nous puissions avec clarté et conviction porter nos valeurs, clarifier nos pratiques.
Mais aussi, afin que soient actés, à la prochaine AG Nationale des CEMEA, des transformations dans la charte, avec le retrait de « l’athéisme prôné », afin que des décisions soient prises dans chaque AT pour une laïcité accueillante au sein des CEMEA.
Et parce que tant encore il est d’actualité de le citer : « J’étais vendu, archi vendu à l’autre camp, au camp des casseurs de vitres et des voleurs de poules. Aux réunions du Conseil d’Administration, j’étais coincé entre un procureur de la République et un inspecteur de l’Assistance publique, espion pâle et tenace camouflé en ambassadeur (consultatif) de ces crapules d’enfants… Qu’il ne faut plus appeler délinquants, pour le redressement moral desquels tout doit être mis en oeuvre… Moi je demandais un ballon de football. Nous ne l’avons jamais eu. Je pourrais raconter comment nous l’avons volé mais il n’y a pas encore prescription… » Fernand Deligny. Cathy Lormant. Militante des CEMEA. ARIF/INFOP/ ECOLE 14 Juillet 2015 – Paris- @: lormant.catherine@gmail.com
A propos des CEMEA et de la laïcité
Ce texte aborde la mise en mouvement, la mise en vie, des valeurs des CEMEA et plus particulièrement celle du principe de laïcité tel que défini par eux : « La laïcité, c’est l’ouverture à la compréhension de l’autre dans la connaissance des différences et dans le respect du pluralisme. C’est donc le combat pour la liberté d’expression de chacun et contre toute forme d’obscurantisme, d’aliénation, de discrimination, d’exclusion et d’injustice. »
Ce texte aborde donc des choses qui sont au coeur de l’engagement militant au sein des CEMEA. Sa focalisation sur la mise en mouvement, la mise en vie, par les CEMEA du principe de laïcité tient au constat qu’à l’image de la centralité de ce sujet dans la société française d’aujourd’hui, les CEMEA y consacre actuellement une part importante de leur énergie en toute cohérence avec leur engagement dans l’ici et maintenant.
En résonance avec la notion d’essaimage des valeurs des CEMEA, ce texte est écrit par une personne qui est sur le chemin de l’adhésion ou, pour le moins, celui du membre de soutien.
J’ai fait mon entrée dans le milieu de l’animation socioculturelle avec les CEMEA au début des années 90. Cela m’a mené jusqu’à l’obtention du DEFA en 2005 après avoir suivi la formation de l’INFOP.
Si évidemment ma vie d’animateur socioculturel ne peut se réduire aux CEMEA, tant la vie est polymorphe, ceux-ci y ont une influence certaine. Comment ne pas le reconnaître quand, pour prendre l’exemple le plus frappant, mon expérience d’animation DEFA s’est déroulée en 2003/2004 dans la bande de Gaza, Palestine, dans le cadre du projet « Sous le ciel de Palestine » d’initiation à l’astronomie et d’animation scientifique et technique, mené entre autres avec les CEMEA, la FICEMEA et l’institut Canaan de pédagogie nouvelle ? Il me semble qu’il n’y a pas besoin d’insister sur la situation en Palestine en général et celle dans la bande de Gaza en particulier pour comprendre qu’une telle expérience laisse des traces. Si vie et diversité se conjuguent bien ensemble, certaines expériences, certains agir sont plus marquant que d’autres.
Après une petite dizaine d’année sans contacts soutenus avec les CEMEA, je souhaite aujourd’hui à nouveau faire un bout de mon parcours d’animateur socioculturel avec eux.
La raison en est simple. Je vois notre horizon sociétal (j’évite volontairement le mot « civilisation » tant il est actuellement identifié à l’analyse de S. Huntington) comme une promesse, allant en se réalisant toujours plus, d’espaces/temps de violence, de
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A propos des CEMEA et de la laïcité – Sivan Halévy
destruction, de développement des incertitudes existentielles et de résurgence des peurs au profit d’une minorité détentrice des moyens de la puissance. Cette vision n’a rien d’apocalyptique ou de millénariste. Elle est l’expression d’une analyse historique. Celle qui m’amène à considérer que les systèmes qui composent les ères en viennent à un moment ou un autre à faire face à la problématique de leurs limites et de leur déclin et rentrent alors dans une destructive spirale de lutte pour leur survie. Dans le cadre de ce texte, je n’avancerai qu’un argument pour valider cette analyse : la pérennisation d’une présence militaire conséquente (plus de 7 000) au sein même du territoire français. Il s’agit là d’une étape notable dans la « quotidiannisation » de la violence et dans la militarisation de la société.
Ma vie, parmi laquelle ma vie d’animateur socioculturel, a été construite de telle manière que j’en conclue qu’avec une telle perspective il n’y a pas d’autres solutions que de participer à la construction de solidarités. Je constate que tirer une telle conclusion de ce type d’analyse est largement partagée si j’en juge ce qui traverse actuellement les sociétés civiles grecques et espagnoles par exemple.
Il ne s’agit pas tant d’espérer des lendemains qui chantent que de maintenir des espaces capables de perpétuer des pratiques, des mises en vie, des mises en mouvement qui subissent de plein fouet le processus en cours.
Je parle ici en termes de valeurs existentielles car je crois que nous ne pouvons faire l’économie des dimensions existentielles lorsque nous parlons de ce qui nous met en mouvement. D’autant plus en période de crise aïgue. D’autant plus lorsque nous avons pour objectif de construire la société de demain à travers l’éducation et la formation.
J’entends par solidarité d’une part le respect et le soutien de l’Autre qui face au risque de son annihilation fait acte d’existence non pas par négation de l’Autre mais par affirmation de soi et, d’autre part, le fait de s’associer pour faire ensemble sur le difficile chemin de la reconnaissance mutuelle. Les deux dimensions de cette solidarité pouvant bien sûr se rencontrer.
C’est pour cela que je reviens vers les CEMEA. Et certainEs de celles et ceux qui les font m’en ont chaleureusement donné la possibilité.
Mais voilà que dans ce processus de retour, je découvre des choses qui m’interpellent profondément.
Considérant la sincérité comme un élément important de la solidarité, je tiens à partager cela.
Les faits sont précis :
J’ai participé à une formation BAFA en IDF où des femmes musulmanes ont été amenées à enlever leur voile suite à l’intervention d’un formateur.
J’ai appris que les CEMEA travaillent à Fort-Mahon en partenariat avec une association qui refuse les femmes voilées dans les formations BAFA.
J’ai participé à une journée nationale de réflexion sur la laïcité à la fin de laquelle il n’a pas été souligné que, pour l’essentiel de ce que j’y ai lu et
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A propos des CEMEA et de la laïcité – Sivan Halévy
entendu, la problématique porte sur l’Islam en particulier plus que sur la laïcité en générale et il n’a par ailleurs pas été rappelé que l’exclusion de personnes de stages de formation en raison de leur port du voile est illégal.
J’ai appris que qu’en certains lieux les CEMEA refusent l’inscription de personnes faisant le Ramadan à leur stage BAFA.
Je suis interpellé par d’autres sur le fait que la charte des CEMEA prône la reconnaissance de l’athéisme comme système de pensée et de compréhension du monde et je me demande alors de qui les CEMEA cherchent cette reconnaissance tant l’athéisme fait parti des normes de notre société ? S’agirait-il donc de « convertir » une minorité de la population vivant en France à une des normes de la société ? Il me semble par ailleurs important de faire quelques précisions ici. Dans notre société les questions d’ordre religieux sont hypocritement, tant notre société est imprégnée de culture chrétienne, renvoyées sur la sphère privée. Cela autorise-t-il pour autant à se donner pour « mission la conversion » à l’athéisme ? Que faire alors avec la religion quand l’engagement est une affaire profondément privée ? Sphère publique et sphère privée doivent-elles être considérées comme inconciliables en toute négation de la complexité des individus ? Dans la sphère privée certaines dimensions devraient-elles être occultées quand bien même elles font l’identité d’une personne ? Bref, cette question de l’athéisme dans la charte de CEMEA pose de nombreuses questions qu’une simple affirmation ne peut solder facilement.
Ces faits ne sont pas l’expression d’une orientation nationale mais de mise en mouvement, de mise en vie, localisée, des valeurs des CEMEA. En la matière la seule expression nationale « officielle » que je connaisse est le renvoi sur le Congrès du mois d’août 2015. Par le terme « les CEMEA » utilisé ci-après, j’entends donc un système permettant les situations mentionnées ci-dessus (liste non exhaustive) et non l’ensemble des personnes faisant les CEMEA.
Face à cela je commence à douter de la pertinence d’adhérer ou de soutenir les CEMEA pour construire de la solidarité. Le Congrès sera sans aucun doute un moment important qui influera ma décision finale. Ma manière d’y participer est cet écrit.
Je ne vois pas comment l’exclusion de femmes musulmanes voilées, la non affirmation de l’illégalité de telles exclusions et le fait de ne pas assumer, en mettant en avant la laïcité en générale, que les CEMEA se sentent devoir spécifiquement faire face à une problématique liée à l’Islam peuvent être porteur de solidarité avec les personnes de confession musulmanes et donc avec une partie non négligeable de son public.
Si jamais mon approche de la solidarité n’est pas partagée par les CEMEA et que je m’en tiens à sa définition de la laïcité, je me pose des questions sur la compatibilité de telles faits avec cette définition et donc sur la cohérence des CEMEA.
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A propos des CEMEA et de la laïcité – Sivan Halévy
Je me pose aussi des questions sur la notion d’engagement et de militantisme des CEMEA. S’agit-il d’engagement et de militantisme avec le système dominant ou avec les personnes qui participent à son mouvement ? Je me pose la question car nous sommes dans une période où l’islamophobie, qui, en tant que racisme, est, par définition, institutionnelle, se développe jusqu’au sein d’organisations réputées antiracistes (au sein du MRAP avec l’appropriation de la notion de racisme antiblanc, au sein de la LDH avec le rapprochement de certaines de ses sections de la LICRA). Je me demande alors pourquoi les CEMEA se mobilise autour de la laïcité sur la base des évènements de janvier et non pas (que je sache, mais je peux me tromper) sur la base de « La manif pour tous » et autres mobilisations réactionnaires, de masse et violentes (la violence n’est pas que physique d’une part et, d’autre part une violence symbolique de masse produit des violences physiques) qui ont accompagné le vote sur le mariage entre personnes du même sexe ? Si au regard de son attachement à l’ici et maintenant, les CEMEA se mobilisent autour de la laïcité, il est important de se demander pourquoi telle situation sert de déclencheur plus que telle autre. Car, attaché à l’ici et maintenant, les CEMEA se doivent aussi d’admettre qu’ils sont parties prenantes dans les orientations actuelles de l’hégémonie. Je n’en conclue évidemment pas que les CEMEA sont islamophobes. J’en conclue simplement que la mobilisation actuelle des CEMEA autour de la laïcité manque de clarté quant à son contexte. Et je questionne ce manque pour me positionner plus précisément.
Au regard du contexte sociétal et au regard des valeurs des CEMEA, j’ai l’impression que ce que j’aborde ici est la question des lignes rouges. J’ai envie de faire confiance mais l’enjeu est tel que je crois qu’il avant tout important de faire acte de vigilance.
C’est parce que je m’interroge sur l’actuelle culture des CEMEA que j’écris ce texte. C’est parce que l’idée de ne pas pouvoir faire à nouveau un bout de chemin avec les CEMEA m’affecte que j’écris. C’est parce que j’espère bien avoir des retours que j’écris. C’est ma manière d’en être.
Juillet 2015
Sivan Halévy,
grâce aux retours de quelques personnes des CEMEA que je remercie ici.
sivanhalevy@yahoo.fr