Une intervention mobilisatrice du directeur général, à la clôture du Congrès !

cazaillon

Madame la Présidente de la FICEMEA, Monsieur mon Président, Monsieur le recteur de Grenoble, représentant Madame la Ministre de l’Education Nationale, Mesdames Messieurs amis et partenaires, Chers Amis, militantes et militants,

Nous arrivons au terme de ce 11ème congrès qui a été un congrès d’analyses, de positionnements, de débats, d’échanges, de confrontations, d’agir… parfois d’indignation et de colère constructive, un congrès des CEMEA quoi …..

Avant de développer mon propos, je souhaite, en notre nom à toutes et à tous, remercier l’ensemble des invités qui nous ont fait l’honneur de participer à ce congrès. Remercier plus spécialement les personnalités présentes aujourd’hui, un dimanche, fin août, à Grenoble ! Sans être réellement un exploit, c’est assurément une attention à laquelle nous sommes sensibles, mais j’y reviendrai.

Vincent Chavaroche concluait ses propos d’ouverture en affirmant l’ambition de faire de ce congrès, un peu plus que pour les autres, un congrès du mouvement. Nous l’avions pensé comme tel, nous l’avions même rêvé comme tel ! Un congrès ouvert, accessible à toutes et à tous, engageant les militantes et les militants que nous sommes dans la construction des CEMEA de demain.

Il fallait pour cela créer un élan, engager des dynamiques, et nous placer dans une posture politique qui articule ce que nous serons demain en appui sur notre identité, sur ce qui fait sens commun, l’éducation nouvelle, avec les évolutions, les besoins des publics auxquels nous nous adressons. Nous avons, je le pense, réussi à créer cet élan, cette dynamique. Les apports, les débats, les 100 projets d’éducation nouvelle présentés ici, tout cela s’est inscrit dans le « faire mouvement ».

Depuis nos origines, agissant dans une perspective éducative et émancipatrice, nous affirmons notre volonté de contribuer à construire une société plus juste, plus solidaire, plus égalitaire. Cela situe naturellement notre action dans un courant de pensées de gauche sans que cela fasse référence à aucune appartenance partisane. Ce positionnement philosophique inscrit « dans les courants et les combats de la gauche laïque » nous l’avons de nouveau réaffirmé au congrès d’Amiens en 2005, Vincent l’a redit à l’ouverture de ce congrès.

Si ce positionnement est constant depuis maintenant plus de 40 ans, le monde a profondément changé et donc les fondements de ce positionnement aussi.

Les enjeux sont aujourd’hui, pour beaucoup, mondiaux. Nos valeurs humanistes et sociales, nos pratiques interculturelles, nos actions et nos relations internationales nous positionnent souvent aux côtés des mouvements altermondialistes et de tous ceux qui cherchent des alternatives au système capitaliste. Nous militons pour une économie aux services des besoins des hommes et non au service d’une machine à profits financiers mondiale qui ne fonctionne qu’au bénéfice de quelques uns. A l’inverse de la volonté dominante des forces politiques et économiques libérales qui veulent tout transformer en marchandise, nous luttons à notre niveau pour que l’éducation, la formation, la santé, l’information, la culture échappent aux lois du marché.

L’union européenne à travers ses institutions fait la part belle au libéralisme économique et s’inscrit pleinement dans la mondialisation que nous dénonçons. L’euro est aujourd’hui non pas cet instrument d’échange entre Européens, mais « un totem au nom duquel on peut sacrifier les peuples » (Christian Salmon Mediapart). Aujourd’hui soutenir le peuple grec et ses représentants c’est contribuer à l’émergence de cette Europe solidaire, sociale et politique absolument nécessaire. C’est agir en contre point face à l’extrême droite si séduisante aujourd’hui pour un grand nombre de jeunes et de moins jeunes. Comme nous l’avons défendu lors des élections européennes les CEMEA s’engagent pour construire cette Europe des peuples, s’impliquent dans l’organisation d’une société civile européenne visible et audible. Notre destin à tous est profondément lié à ce qui se passe aujourd’hui en Grèce et à l’issue du bras de fer engagé avec l’UE. Une autre Europe n’est pas un fantasme comme voudrait nous le faire croire des euroseptiques, c’est à nous de l’inventer, de la vouloir et de la faire vivre à travers le projet européen que nous portons.

Ces propos ne sont pas des propos de complaisance, tout cela ne nous pas extérieur. Nous sommes solidaires des camarades Grecs engagés au sein de la FICEMEA. Les CEMEA sont solidaires des camarades de Nouvelle Calédonie dans l’engagement qui est le leur pour construire leur pays, comme nous l’avons été quand nous avons accompagné et soutenu les processus de décolonisation. Tout cela fait partie de notre engagement et de notre histoire comme ce fut le cas en Algérie ainsi que cela nous a été présenté ici.

Enfin et cela nous concerne de plus près encore, au niveau de l’éducation et de la pédagogie là aussi, des mutations sont à l’œuvre. L’éducation progressiste, émancipatrice, les pédagogies innovantes alors en phase avec l’évolution de la société, servant souvent de référence dans le sens du progrès, se heurtent aujourd’hui à une contre offensive conservatrice et réactionnaire au niveau des valeurs comme au niveau des conceptions éducatives et pédagogiques. Nous le constatons en France mais aussi en Europe. La marchandisation de l’éducation porte en elle la fin d’une éducation émancipatrice.

Notre congrès, nous a confrontés de nouveau à certains enjeux sur lesquels nous devrons demain mieux travailler.

Nous avons redit ici avec force la nécessaire dimension Européenne et Internationale de notre projet. Dit autrement, nous avons réaffirmé la nécessité de renforcer, de développer à l’échelle de l’ensemble du réseau, dans toutes les associations territoriales, en mobilisant l’ensemble des secteurs ou des champs d’intervention, l’émergence de projets européens et internationaux. Soutenir et développer les liens avec nos partenaires, promouvoir la création de nouvelles plateformes et de réseau « amis » font parties des pistes que nous souhaitons explorer. Le développement, le déploiement accru de la FICEMEA s’inscrit dans cette perspective. Nous le savons, la mobilité de toutes et de tous favorise l’apprentissage et l’acquisition de compétences sociales et l’exercice de solidarités collectives. Elle permet l’expérience, souvent en appui sur des logiques de volontariat, du rapport à l’autre, au monde. Cela peut se vivre dans son territoire de proximité, dans son pays, autant que dans l’Europe et dans le Monde. Nous avons ici, redit l’importance du droit à une mobilité émancipatrice, pour construire une Europe ouverte sur le monde, par l’éducation interculturelle et les échanges entre citoyens. Mais nous avons associé mobilité et réciprocité. Donner et recevoir, permettre le départ comme nous nous ouvrons à l’accueil. C’est cela qu’il faut aujourd’hui renforcer ! Nous le ferons dans le cadre de notre propre projet mais nous le ferons aussi au sein des plates-formes et collectifs dans lesquels nous sommes investis comme Solidarité Laïque et SOLIDAR par exemple.

Nous le savons, en France, mais dans un débat qui mobilise aujourd’hui d’autres pays, la question de la Laïcité est devenue, redevenue centrale. Les CEMEA ont mis la laïcité au cœur de leurs principes. Elle est aussi un des piliers fondamentaux de notre société. Pourtant, depuis plusieurs années celle-ci est régulièrement fragilisée par ceux là même qui ont mission de la garantir. Pour ces raisons nous devons toujours militer pour que l’Etat et l’ensemble des pouvoirs publics respectent et fassent appliquer les principes qui fondent la laïcité :

  • Liberté de conscience,
  • Séparation des églises et de l’Etat,
  • Libre exercice de toutes les religions comme de ne pas en avoir,
  • Libre exercice de la pensée hors de toute référence à une religion
  • Respect des droits de l’Homme et des diversités culturelles.

Cela nécessite de combattre les fondamentalismes, les prosélytismes et les replis communautaires. Cela nécessite aussi à un autre niveau de lutter contre les conditionnements de la publicité, de certains médias et des marchés. Cela nécessite aussi de mettre en tension laïcité et citoyenneté. Au moment où certains découvrent « l’empowerment », où les questions de participations deviennent prédominantes dans le débat public, être la « nation arc en ciel » suppose que nous élaborions une pensée collective qui dise comment nous articulons démocratie, citoyenneté et laïcité. Mais ces exigences ne suffisent pas pour un mouvement d’Education car c’est au niveau des actions quotidiennes que nous rencontrons des attitudes revendicatrices et prosélytes qui mettent en difficulté les formateurs et les acteurs éducatifs. Cela pose la nécessité d’accompagner les militants sur le terrain et de construire des actions de formation sur ces questions. Pour cela il sera nécessaire de construire de nouvelles modalités d’animation de notre mouvement, d’ouvrir des espaces de débats permanents pour l’ensemble des militantes et des militants de notre mouvement.

Dans nos pratiques de formation et d’accompagnement, nous faisons référence à l’éducation nouvelle et à l’éducation populaire, qui, au travers de la dialectique individu/groupe, contribue à la construction du lien social. Nous devons donc agir pour que l’acte de formation participe de l’inscription des individus dans la société, et pour qu’il contribue à la régulation des rapports sociaux dans une perspective de cohésion sociale et de solidarité. Face aux risques d’instrumentalisation, nous devons réaffirmer la primauté du social et des solidarités sur la marchandisation du monde, de l’éducation et de la prévention sur la répression.

Cela commence par l’attention que nous portons à la place de la parole, à nos capacités d’écoute. Attentif à la parole entre nous, attentifs à la parole de l’Autre, ces enjeux se sont exprimés ici, et nous avons pu y compris en mesurer l’importance dans le quotidien de nos travaux. Nous avons vécu et partagé de merveilleux moments. Les témoignages portés par nos camarades de Nouvelle Calédonie sur la flèche faitière et de Guyane sur l’action avec les amérindiens ont démontré que nous pouvions faire, que nous savions faire. Il y a là pour nous, pour soutenir « l’exigence de qualité » mais aussi parce que la confiance en l’Autre se construit par la sollicitude et l’écoute, la nécessité de retrouver demain les moyens de mieux nous entraîner, de mieux nous former.

Poser les questions de l’attention à l’autre, de l’écoute et de la parole, c’est chercher à mieux considérer les publics que nous accueillons dans nos actions. Cette préoccupation n’est pas nouvelle. Mais ici, nous avons partagé la nécessité de mieux réfléchir, de mieux travailler la place des familles, de préciser ce que nous portons s’agissant de la « parentalité ». Nous avons des conceptions élaborées, appuyées sur l’expérience, et des ambitions, voire même des ressources. Mais sur le fond, nous éprouvons la nécessité de mieux travailler ces questions. Il faut étayer nos analyses, appréhender les mutations à l’œuvre aujourd’hui et revisiter, étoffer nos conceptions.

Considérer les publics, c’est aussi situer les cadres, les situations de la rencontre. Nous avons eu des échanges passionnants sur les actions à destination de personnes, jeunes ou moins jeunes, en milieu carcéral. Nous avons mesuré la nécessité de prolonger nos échanges de partager les expériences, de situer les enjeux pour un mouvement comme le nôtre.

Le projet associatif actuel, issu du congrès d’Aix en Provence le disait, mais le temps passe et le temps passe vite. Nous parlions alors de façon privilégiée des médias et des enjeux qui leurs sont liés. 5 ans après, en appui sur de nombreux projets, souvent exemplaires, nous portons et travaillons les enjeux du numérique. Sans rien abandonner de nos réflexions sur les médias, nous affirmons ici avec force la nécessité de mieux investir le numérique, de développer nos positionnements politiques, de renforcer l’appropriation collective des enjeux politiques qui y sont liés par l’évolution de nos propres pratiques et la mise en œuvre d’un plan de formation des militants sur ces questions.

C’est à nous qu’il revient aujourd’hui d’incarner ces enjeux, de faire nôtre ces combats. Il est de notre responsabilité collective de traduire au quotidien à travers nos postures, nos actes et nos actions ces ambitions militantes. C’est le sens des « 100 projets d’éducation nouvelle » que nous avons mis au débat entre nous. Penser le développement, porter le développement, c’est considérer que depuis plusieurs années les CEMEA ont inscrits leur activité dans une relation partenariale plus forte et plus articulée à certaines politiques locales. Comme l’indique les travaux issus de la recherche-action portée par Joëlle BORDET et Anne-Claire DEVOGE, « une diversité des formes de gestion s’est installée correspondant à la diversité des formes de production. D’autres formes de rétribution et de solidarité ont vu le jour. Ces évolutions méritent d’être étudiées en tant que telle mais il est aussi nécessaire de les penser dans une approche concertée du développement. »

Pour notre mouvement, l’un des enjeux réside dans nos capacités actuelles et futures à passer d’une dynamique du développement le plus souvent agi sous la pression économique à celle d’une évolution stratégique permettant de faire face aux évolutions générales de la société. Face à la complexité des enjeux actuels, au retrait parfois du dialogue avec les institutions, il existe pour les CEMEA, mais sans doute plus largement pour l’ensemble des mouvements militants un risque de retrait idéologique. Ainsi, les travaux que nous avons conduits ici à Grenoble, à partir de ces 100 projets s’inscrivent-ils dans la triple perspective de conjuguer le sens de notre projet, nos capacités à élaborer et mettre en œuvre des actions originales tout en les situant comme autant de réponses adaptées aux besoins des publics et des territoires.

De façon massive, le congrès a posé avec force la nécessité de s’appuyer certes sur nos propres compétences, mais aussi sur celles des autres. L’instauration et le développement de relations de partenariats, la recherche du sens commun avec le plus grand nombre sont conçus et affirmés comme des conditions indispensables au développement de notre mouvement. Qu’il s’agisse des organisateurs d’accueils collectifs de mineurs, des lieux de créations ou de diffusion culturelle, des festivals de culture associative non encore rattrapés par des préoccupations marchandes, des collectivités locales, nous posons comme l’une des orientations majeure de notre mouvement celle d’inscrire nos actions dans des cadres communs, des cadres qui associent, qui agrègent des compétences plurielles au service de projets partagés. Travailler « avec » ou travailler « pour » font partie des réflexions que nous avons partagées.

Nous nous sommes posé ces questions s’agissant des institutions notamment celles du système pénal, des DRAC, de l’Education Nationale et de nos relations avec l’Ecole. Mais nous avons inscrit nos réflexions dans un axe dynamique, positif. Oui c’est difficile, oui nous n’y arrivons pas toujours, mais c’est bien AVEC que nous voulons faire. A d’autres endroits, quand les affinités s’inscrivent jusque dans le partage des conceptions et des ambitions, alors nous parlons d’alliance ! Faire alliance avec celles et ceux qui se reconnaissent avec ce qui fait identité pour nous, l’Education Nouvelle, constitue aujourd’hui l’un des axes de notre projet.

Partager les compétences, c’est aussi maintenir au sein même des CEMEA notre capacité à nous former et donc à renforcer nos propres compétences. Le congrès pose cette ambition quand il dit vouloir soutenir et développer les groupes de recherche et de pratiques nationaux. Qu’il s’agisse du renforcement de nos réflexions sur l’alimentation et la gestion ; de la danse ; du théâtre ou encore des Activités physiques et sportives, nous posons le principe de créer ou de renforcer ces espaces d’Agir. Faisant cela nous renforcerons la place la vie pédagogique de notre mouvement comme l’un des axes prioritaire de notre projet. Il en est de même, pour les questions d’éducation au patrimoine, sur le jeu/les jeux, sur les pratiques culturelles et artistiques ainsi que sur les rapports entre « genre et égalité ». Certains focus ont par ailleurs révélé la nécessité de mettre au travail certains sujets sur lesquels nous n’avons que peu de référence collective : la prévention des conduites à risques, la maltraitance, la sanction, l’égalité homme-femme, en font partie.

Agir, produire et diffuser ! Quelques soient les modes utilisés, la diffusion de nos idées, reste un objectif essentiel. Publier, laisser une trace c’est donner à lire, à entendre, à voir nos pratiques et nos conceptions. Il faut mieux le faire et le faire davantage !

Et puis sans doute, étayer nos productions, actualiser nos références, c’est aussi nous renforcer nous-mêmes. Au côté de nouvelles dynamiques de recherches, de recherche-action, la formation des militantes et des militants doit s’appuyer sur l’appropriation de ce qui fait référence pour les CEMEA. La table ronde sur la psychothérapie institutionnelle, unanimement appréciée par celles et ceux d’entre nous qui y ont participé, témoigne de cela. Elle a resitué l’enjeu politique dans le contexte d’aujourd’hui, permis la réappropriation de références, et démontré ce que les CEMEA doivent à ces approches.

Notre mouvement s’est construit sur ces apports, sur ce que nous avons su développer en convergence tant dans le champ des loisirs, de l’école comme de la santé mentale. Notre mouvement dispose d’une richesse insoupçonnée et sans doute insuffisamment travaillée aujourd’hui quand il rassemble des enseignants, des animateurs, des éducateurs, des psy, des médecins, des travailleurs sociaux, des artistes etc. Il faut réveiller davantage cette diversité, mobiliser ces regards pluriels, ne pas abandonner, jamais, aucun de ces champs d’intervention.

Porter ensemble cette permanence de l’innovation, agir au quotidien pour « être toujours ce petit grain de sable » (E.Plenel), c’est militer de toutes nos forces pour passer d’une logique de constante adaptation à celle de l’anticipation, passer du rôle d’acteur à celui d’auteur. C’est revendiquer notre ancrage dans le champ de l’éducation populaire, mais c’est peut être avant tout prendre des risques ! Et nous faisons le pari de pouvoir les assumer ensemble ! « Centres d’Entraînement… » nous « ré-entraîner à » …. Accepter de prendre des risques, saluer l’effort quand certains ne reconnaissent que la seule réussite, promouvoir le « tâtonnement expérimental » qui permet aux inventions de se construire par l’expérience concrète pratique, vécue. Tel était le pari de ce congrès. Mais c’est aussi celui des mois à venir. Nous entraîner à prendre de la distance avec le quotidien, à penser l’environnement, à penser la place de nos actions dans leur adéquation aux besoins d’aujourd’hui, à imaginer et proposer comment nous pouvons mieux faire. Oser, tenter, essayer et réussir ! Si notre maison est celle de l’éducation populaire, nos ambitions et nos postures sont celles de l’éducation nouvelle !

Quand l’Education a pour ambition de contribuer à la formation de citoyens autonomes, d’éduquer à l’esprit critique pour ne pas accepter de fait le système dominant, alors elle devient subversive. « Mon objectif, ce n’est pas de construire la société de demain, c’est de montrer qu’elle ne doit pas ressembler à celle d’aujourd’hui » disait Albert Jacquard.

 

Mes chers camarades, ce congrès marque une étape importante dans la vie de notre mouvement. Pour faire de cette étape une réussite, un levier, il nous faut conserver l’énergie, les ressources et les moyens « de rendre intelligible le présent et d’y mettre de la raison » (E.Plenel). Conserver « l’esprit FOCUS » comme l’on dit des participants de ce congrès, c’est faire de nos pratiques et de leur mutualisation le cœur d’un processus vertueux de développement, qui se fonde non pas sur le seul discours, mais sur les multiples traductions en actes de nos pensées. Les 100 projets présentés témoignent de notre façon à nous de « faire politique ». Ne nous y trompons pas, quand pour certains le discours suffit, pour nous c’est AGIR qui fait politique !

Renforcer la dimension du mouvement, mieux ancrer nos actions dans la cohérence politique de nos pratiques et de nos valeurs d’Education Nouvelle, y a-t-il plus beau projet que celui-ci ? Le seul pari qui vaille est celui de redonner vie, de redonner souffle à l’engagement militant de chacune et de chacun des camarades d’aujourd’hui, jeunes ou plus anciens dans leur histoire au sein des CEMEA, pour inscrire avec énergie et détermination les CEMEA de demain dans l’actualité de notre pays.

Réussir cela suppose de redire avec force que c’est en renforçant la dimension du mouvement que nous réussirons. Nous n’avons pas d’ambition autre que celle d’associer, d’embarquer avec nous le plus grand nombre d’acteurs de l’éducation. Alors, Il faut redire ici que la fonction d’animateur du mouvement portée et investie par des permanents et des non permanents en capacités d’imaginer puis de mettre en œuvre des logiques d’accueil et d’accompagnement de militantes et de militants est une fonction centrale, vitale pour les CEMEA. Il en est de même pour nos capacités à rendre réelle chez nous, au sein même de notre mouvement, une certaine mixité sociale qui fasse que demain, plus encore qu’aujourd’hui, nous soyons nous aussi des militantes et des militants « arc en ciel »

Au service de ces ambitions, mais plus globalement au service de la qualité pédagogique des actions conduites, la formation des militants reste une priorité de l’animation du mouvement et doit être renforcée et mieux organisée. Elle doit être pédagogique, éducative et politique car l’Education Nouvelle est politique, car agir en Education relève d’un engagement politique.

Mais nous savons aussi, que nous ne sommes pas seuls, que nous ne pouvons agir seul, que nous ne voulons pas agir seuls ! Dans le contexte politique d’hier, d’aujourd’hui et assurément de demain, il nous faudra donc renforcer alliances et partenariats. Notre action, construite en lien étroit avec la réalité, avec les réalités, nous engage auprès d’autres acteurs, auprès des commanditaires, auprès des publics. Mais nous sommes aussi mobilisés au sein de collectifs, nous avons construit de longue date des liens affinitaires avec d’autres acteurs du monde associatif. Nous devons renforcer ces liens, en tisser de nouveaux.

Nous devons accepter la difficile gestion de proximités politiques et d’engagements tout en assumant les tensions issues de nos développements respectifs. Ainsi, je souhaite le dire ici avec force devant nos camarades, nos partenaires et nos alliés, les CEMEA resteront demain engagés, loyaux, respectueux des choix collectifs. Face aux forces réactionnaires, face à une droite décomplexée et d’une extrême droite revigorée, nous devrons, mieux encore, serrer les rangs. Nous aurons besoin toutes et tous de faire front, de contribuer chacun de notre place à l’étayage d’un secteur associatif déjà malmené. En ce sens, ce que nous avons construit aujourd’hui, ensemble, avec les FRANCAS et la Ligue de l’enseignement, ce que nous construisons avec la Fédération Générale des PEP, et les Centres Sociaux s’avère fondamental. Mais nous devons aussi, à l’interne même de notre mouvement, nous préparer, anticiper les évolutions inéluctables qui résulteront demain des changements de majorité adossés aux évolutions territoriales engagées aujourd’hui. Sans replis idéologiques mais avec conscience. Cette conscience d’une tâche qui n’est pas simple, mais dont l’enjeu est fondamental ! Le congrès de Grenoble sera celui où nous aurons, collectivement, été en capacité de dire ce que nous voulons faire de nous-mêmes avant que d’autres nous contraignent à accepter ce qu’ils auront voulu faire de nous !

 

La rentrée est là. Avec elle un retour au quotidien, un retour aux enjeux d’aujourd’hui. Ainsi en sera-t-il de notre mobilisation dans le collectif des 39 pour soutenir les enjeux qui portent sur le devenir de la psychiatrie et de la santé mentale, de notre engagement au sein du CAPE pour poursuivre nos ambitions d’une refondation au service de la réussite de tous les enfants et les jeunes de notre pays, de notre mobilisation au sein du CNAJEP pour renforcer la place de l’Education Populaire et affirmer la modernité de nos combats et de nos valeurs.

 

Les propos de ce discours sont construits en appui sur l’ensemble des fiches de synthèse qui nous sont parvenues. Il nous faudra un peu de temps pour finaliser puis mettre en œuvre les conclusions de ce congrès. L’équipe de direction nationale portera cette dernière étape en appui sur les instances nationales de rentrée (Comité de direction, conférence des présidents, CA,…) en impulsant la mise au travail du réseau dans des modalités à définir. Le rendez-vous militant du 19 au 23 décembre prochain à Saint Front constituera une étape capitale dans ce processus de finalisation.

 

Pour conclure

Dans une période complexe (mais y a-t-il eu des périodes « simples » ?), il est vital que nous entretenions et développions nos capacités d’indignation et de résistance. Mais il est tout aussi vital d’entretenir et de développer nos capacités d’émerveillement, de rêve, de sollicitude. Mes chers amis, nous sommes tout cela à la fois, c’est notre histoire, mais c’est aussi notre devenir, celui que nous avons commencé à projeter ici à Grenoble.

Je vous remercie toutes et tous, militantes et militants des Ceméa pour votre engagement dans ces travaux et la disponibilité de certaines et certains d’entre vous qui ont assumé les fonctions d’animation des différents temps de travail.

Je salue le travail et l’engagement des membres du GDC qui ont porté depuis presque deux ans ce congrès accompagnant le passage du projet à sa mise en vie.

Je remercie l’équipe du projet accueil parents/enfants pour avoir conduit et réussi ici, en appui sur les parents eux-mêmes, cette expérimentation.

Enfin, en notre nom à tous, j’adresse nos amitiés, nos remerciements aux militantes et aux militants de l’AT Rhône Alpes pour leur mobilisation depuis plusieurs mois, leur accueil, leur attention aux personnes, leur disponibilité malgré les nombreuses contraintes qu’ils ont eues à surmonter. Vous avez apporté une contribution majeure à la réussite de ce congrès.

Merci !


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