Par Marion Rétaux et Olivia Rambur.
Qui de mieux placé-e-s pour nous parler de genre que des membres du Groupe National Genre? Nous les avons rencontré-e-s dans l’environnement suscitant dédié à cette thématique.
VOUS ÊTES QUI ?
Bonjour, je m’appelle Mélina, je suis de la région Centre et j’ai rejoint le groupe national Genre et Égalité cette année, j’ai trouvé que c’était une bonne ressource pour les questions de genre et j’étais contente d’y découvrir beaucoup de questionnements qui enrichissent ce qui se passe dans notre AT !
Je m’appelle Laurence, à l’origine je viens de la région Alsace et me voilà en Rhône-Alpes, le groupe national Genre je suis en train de le rejoindre, ce sont des questions que je travaille dans mon quotidien, et aussi sur mon cursus universitaire puisque je travaille sur les stéréotypes de sexe et l’éducation dans le cadre de mes études : je pratique, c’est un fil rouge dans ma vie. J’ai envie de mutualiser aussi et voir comment on peut, vers l’extérieur, avancer sur ces questions, mais aussi au sein de notre mouvement d’éducation populaire.
Thomas, militant en Île-de-France dans le groupe Genre et Égalité, et au national. Je suis militant sur les questions de domination en général, donc anti-impérialiste, anti-raciste et anti-sexiste sur d’autres collectifs également hors CEMÉA. Et comme Laurence j’ai travaillé ces questions via mon cursus universitaire puisque j’ai fait un master 2 « Genre et politiques sociales ».
Élodie, AT d’Alsace, militante membre active bénévole et au Conseil d’Administration depuis peu, ça fait plusieurs années que je suis militante maintenant, je suis rentrée aux CEMÉA sur un groupe de danse traditionnelle, et rapidement je me suis intéressée aux questions de sexisme et de discriminations et à comment tout ça s’articule par rapport à la pédagogie et à la petite enfance. J’ai un cursus scientifique, actuellement je suis chargée de mission dans plusieurs associations autour de l’écologie.
Je m’appelle Céline, je suis chargée de mission sur les politiques et pratiques éducatives sur les CEMÉA Alsace et j’ai une mission sur les discriminations genre et égalité aussi, je crois être une des seul-e-s salarié-e-s du réseau dont c’est le cas ! J’ai participé à des échanges inter-région avec le Pays de la Loire, l’ARIF, la Bourgogne sur les questions de genre.
LE GROUPE GENRE C’EST QUOI ?
Élodie : Le groupe Genre a existé sous différentes formes au national, il avait disparu pendant un temps pour différentes raisons et ça fait un an qu’on travaille à sa recréation sous la forme d’un groupe à deux thématiques : « Genre et Égalité ». Le groupe s’oriente sur le fait que ce soit un regroupement de militant-e-s d’ATs différentes pour partager nos outils, nos analyses, nos impressions et nos vécus, et aussi pour avoir des billes et faire vivre ces questions dans nos pratiques. Le groupe prend la forme de regroupements nationaux, le prochain aura lieu les 14 et 15 Novembre.
Mélina : Il n’y a pas vraiment de symétrie entre les participant-e-s, dans certaines AT il y a des groupes Genre très actifs où il se passe beaucoup de choses et d’autres AT où une seule personne sent ce truc là vivre en elle et qui n’a pas d’écho, elle va utiliser le groupe Genre national pour participer aux questionnements et trouver de la ressource. Le contenu du groupe est très évolutif et dynamique, c’est très différent d’un regroupement à un autre, les objectifs changent selon les personnes présentes.
Thomas : C’est Anne SABATINI qui est référente nationale du groupe, elle impulse les regroupements nationaux, mais elle n’est pas chargée de mission sur cette thématique, c’est un travail énorme qu’elle fait sur son temps militant !
Céline : En Alsace, on a un groupe « Pratiques et Analyses Féministes » qui se réunit une fois par mois, on travaille une thématique différente à chaque fois, qu’on analyse ensemble. Au niveau de mon activité salariée il y a des interventions dans les lycées et collèges, dans les centres sociaux auprès d’adultes et de plus jeunes, des ciné-débats, j’ai participé aux échos du Festival du Film d’Éducation, on intervient en formation professionnelle et en formation d’enseignant-e-s. Le groupe et la mission salariée travaillent ensemble, on développe des outils, on teste des trucs, on est aussi en lien avec les autres associations féministes du territoire .
COMMENT REJOINDRE LE GROUPE GENRE ?
Élodie : Sur le dernier rassemblement en juin, l’objectif était de réfléchir au congrès, on voulait être présent-e-s dans l’environnement suscitant pour montrer que le groupe existe ! Ca nous permet de récupérer les mails des personnes intéressées et qui sont isolées dans leurs ATs, on va faire un appel pour le prochain regroupement, pour que tout le monde puisse venir. On va essayer d’investir les outils web et de publication, notre objectif est de publier dans le VEN pour rappeler qu’on est là et avoir une page web dédiée pour que ce soit plus facile de nous rejoindre.
QU’EST-CE QUE VOUS PROPOSEZ SUR L’ENVIRONNEMENT SUSCITANT ?
Laurence : Sur l’environnement suscitant, on proposait une thématique par jour : jeudi « Représentations égalitaires aux CEMEA, c’était un travail sur les temps de parole à partir d’un texte et d’une étude de l’ARIF, on a réfléchi à pourquoi il est important de répartir la parole égalitairement entre les hommes et les femmes, en prendre conscience, et comment on peut agir. Vendredi « Où en sommes-nous dans nos postures éducatives ? » Nous avons creusé les questionnements qu’on peut avoir autour du genre, de la mixité, et de la parité en ACM. Et aujourd’hui samedi, « Ecriture égalitaire », c’est un temps de pratiques sur comment on peut écrire et parler de manière égalitaire, comment s’y entraîner car c’est une construction, ça s’apprend, et plus on l’utilise plus ça devient un réflexe.
Céline : A Aix, on avait déjà un stand, mais un stand un peu informel et les questions étaient très peu présentes, d’ailleurs elles n’apparaissent pas dans le manifeste ce qui nous a un peu « chafouiné-e-s… » alors au vu du congrès de Grenoble c’était impossible que ces questions soient absentes ! On s’est réuni-e-s avec un petit groupe bien motivé pour réfléchir au « comment », et je suis très contente de ce qui s’est passé ici ! L’objectif était que ces questions apparaissent, en évitant de créer des clivages. C’est très chouette qu’on ait eu cet espace là sur l’environnement suscitant. Chaque Région a ramené ses trucs, c’est la somme de nos richesses régionales. Il y a aussi des choses spontanées qui se sont faites au vu de ce qu’on vivait sur le congrès. Il y a également des articles qui sont parus. On se réjouit que ces questions aient été portées sur un axe 3, la volonté était d’avoir des propositions pour la suite, même si ça ne fait pas consensus, comme la laïcité d’ailleurs, mais les questions sont présentes alors objectif rempli !
Mélina : L’environnement suscitant répond à plein d’objectifs et d’envies. On recharge nos lunettes du genre en observant le congrès, c’est un point pour discuter de ce qui se passe ici, notamment sur les prises de parole. C’est aussi un relais sur ce qui se passe dans le groupe national. Un moyen d’embarquer des gens avec nous ! Et concrètement on a utilisé cet espace pour faire des petits laboratoires, des réflexions collectives, aux trois animations qu’on a proposé on a rencontré des personnes différentes à chaque fois. On se nourrit des réflexions. On a utilisé l’espace pour le partage d’outils et de documentation, et c’est aussi devenu un endroit de sensibilisation à la question du genre : beaucoup de militant-e-s découvraient et ça a fait tilt ! pour bon nombre d’entre eux/elles, je trouve ça super !
Le sujet du Genre concerne tout le monde et remue, on peut souvent se sentir attaqué-e-s ou concerné-e-s en tous cas, c’est très chargé émotionnellement, alors on a besoin de se décharger aussi. J’ai l’impression qu’il y a quand même un ressenti pour pas mal de militant-e-s qui sont choqué-e-s, gêné-e-s. Il y a du « charriage » beaucoup, qui est vécu comme une violence, on se fait charrier par rapport au fait de travailler les questions d’égalité et de genre aux CEMÉA, c’est minoré et méprisé parfois, et ça me pose question… Toutes les thématiques ne provoquent pas de telles émotions, mais tout ça n’a pas empêché de très chouettes discussions, malgré les réticences…
EST-CE QUE VOUS TRAVAILLEZ UNIQUEMENT SUR DES PROBLÉMATIQUES LOCALES OU VOUS INTÉRESSEZ-VOUS AUSSI A LA PLACE DE LA FEMME A L’INTERNATIONAL ?
Elodie : Dans le groupe national, on n’a pas encore travaillé par thématique, on fait en fonction des besoins des militant-e-s qui participent aux réunions. Peut-être que ce n’est pas la place du groupe national de fixer des lignes de fond, ces réflexions doivent se faire au niveau local, les débats seront plus complexes et profonds en ayant plus de temps, sur un regroupement national ça peut être une thématique mais en partant d’une pratique locale. Par exemple en Alsace on a travaillé sur des icônes du féminisme non occidental, et le groupe genre du Pays-de-la-Loire s’est penché sur la question des femmes en Palestine.
AVEZ-VOUS UNE LIGNE DE POSITIONNEMENT PAR RAPPORT AU FÉMINISME ?
Élodie : On a fait le choix de ne pas commencer par se mettre d’accord mais de regarder ce qui se passe dans les AT et partager nos pratiques pour l’instant. On partage les constats, on débat, mais on n’essaye pas forcément de tou-te-s se mettre d’accord, même si je pense qu’on n’y échappera pas !
Céline : En fait, les points de divergence sont toujours les mêmes : la question du voile, la prostitution, la question de la place des hommes, celle des stratégies. Mais comme on est un mouvement pédagogique on réfléchit d’abord aux outils. Bien qu’il faille faire attention à la recherche d’outils avant de se poser les questions de posture et de sens. La question des stratégies est centrale, on a eu beaucoup de crispations et de mouvements défensifs entendus sur ce congrès : « le groupe genre c’est ceux qui comptent les prises de parole »… Mais du coup qu’est-ce qu’on en fait ? Comment pédagogiquement on peut permettre aux personnes de ne pas s’arrêter à ça pour ne pas braquer et stéréotyper encore plus… ?
Élodie : Je suis contente que ce qui a été mis en avant ce soit l’intégration des questions de discriminations et de sexisme au sein de nos pratiques, on voulait mettre l’accent là-dessus et on n’a même pas eu besoin de le faire, ça s’est fait naturellement. Beaucoup de gens disent qu’il faudrait qu’on soit tou-te-s formé-e-s, et qu’on ait tou-te-s des outils pour traiter ces questions.
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